Choisissez une catégorie

Découvrir Kerry James Marshall et ses œuvres noires

12 May, 2022
Kerry James Marshall est un des rares artistes noir contemporain qui connait un succès grandissant aux Etats Unis.
Personne ne vous laissera entrer dans le petit monde de l ‘art.
— Kerry James Marshall

C’est une réalité que Kerry James Marshall, un des artiste peintre les plus estimés aux Etats-Unis,  connaît bien. « Vous pouvez attendre que quelqu’un vous ouvre la porte, ou vous pouvez assumer votre place en tant que leur égal et vous insérer dans le monde de l’art et vous insérez dans des histoires que vous voulez voir raconter. », dit-il.

 

Les peintures grand formats de Kerry James Marshall, représentent des sujets à la peau si noire qu’elle en paraît irréelle, et placent des personnages dans des lieux communs pour raconter leurs histoires– un barbier, une fête dans le jardin, ou les ghettos du sud de Chicago, où Marshall vit et travaille, dans le quartier de Bronzeville, depuis 1987.

 

Cette simplicité s’étend jusque dans sa personnalité. C’est le genre de personne qui va venir à votre rencontre, qui que vous soyez. Cette ouverture d’esprit requiert une certaine disposition – une certaine façon de voir le monde – qui est avant tout amicale et ouverte.

 

Dépeindre Kerry James Marshall comme un représentant de l’art des noirs Américains - les « African-American » - serait largement réduire sa portée, lui qui explore les profondeurs de la beauté noire, un sujet largement éludé, utilisant les outils des vieux maitres , depuis bientôt 40 ans.

 

« Vous n’avez pas beaucoup, dans l’histoire, de noirs qui essaient de se représenter en tant qu’idéal, ou avec une grâce ordinaire, » nous dit-il, «où une personne ne va pas essayer de se représenter comme une espèce de symbole politique ou idéologique, mais seulement chercher à être élégante par sa présence. Il en reste une image très belle, et c’est tout ce qu’elle doit être, sans autre prétention ou détournement. » 

 

Les tableaux de personnages à la peau d’ébène exagérément noire de Kerry James Marshall, qui sont exposés au travers des Etats-Unis aux coté des tableaux des Vieux Maitres, sont tout justement cela.

Marshall, Sans titre - Beach towel 2014

Ils commandent à leur environnement avec un calme grave, mais aussi une qualité iconoclaste : les spectateurs n’ont pas l’habitude d’être ébahi devant des personnages avec cette couleur de peau, cette contenance plus noire que noire.

 

‘Il nous met devant nos préjudices raciaux et nous défie de regarder ces personnages noirs et les considérer comme non-esthétiques, n’ayant pas d’originalité et de complexité. Il saisi bien notre bluff. » nous dit l’artiste Hank Willis Thomas.

 

La possibilité qu’un émerveillement ou un ébahissement puisse provenir d’un lieu où l’on ne l’y attend pas fait partie de ce qui a guidé Kerry James Marshall dans sa carrière et reflète les tournants de sa vie.

 

La vie de Kerry James Marshall

Né à Birmingham en 1955, il déménage avec sa famille dans le quartier de Watts à Los Angeles en 1963, un an avant le passage du « Civil Right Act » et deux ans avant les « Émeutes de Watts », attisés par une situation socio-économique très difficile pour le quartier.

Sa famille part du ghetto du Nickerson Garden (qui inspira sa série « Garden Project ») en 1964 pour une maison en bas du quartier général des « Black Panther », qui appartenait à un barbier.

 

Ce barbier inspira Kerry James Marshall pour son portrait de groupe « De Style » (1993), un travail important qui représente de manière iconique la culture de la coupe de cheveux et de la gaudriole telle qu’elle est propre aux noirs Américains, tout en profitant de l’occasion pour y glisser le langage abstrait du mouvement hollandais « de stiljl » dans cet intérieur aux couleurs primaire « Modrianesque ».

 

Largement influencé par la communauté d’artistes noirs de Los Angeles qui émergèrent après les émeutes de Watts – Betye Saar, Noah Purifoy, Charles White, et bien d’autres – Kerry James Marshall recherche une éducation d’art traditionnel, choisissant la peinture car c’était la force dominante dans les musées… et il voulait y entrer !!!

 

Depuis son plus jeune âge il dévore les livres consacrés aux artistes de la Renaissance, ainsi que la publication de 1967 de « Images de la dignité : les dessins de Charles White » qui contenaient des dessins de personnes de couleur comme jamais il ne les avait vus. La curiosité de Kerry James Marshall était portée par la volonté de savoir pourquoi les œuvres des grands artistes sont ce qu’elles sont, ce qui l’amena à « hanter les galeries du LACMA », comme il dit.

Le travail qui l’a révélé « A portrait of the artist as a shadow of his former self » est un portrait noir sur noir d’un homme affublé d’un sourire digne du chat d’Alice, qui fait tout sauf disparaître, évoquant également le livre de Ralph Ellison « L’homme invisible » qu’Ellison écrivit en 1952. « Je suis un homme de substance, en chair et en os, fait de fibres et de liquide – et je pourrais même avoir une âme. Je suis invisible, comprenez, simplement parce que les gens refusent de me voir. »

 

Marshall, Portrait of the artist as a shadow of his former self

Depuis « Portrait de l ‘artiste » les tableaux de Kerry James Marshall ont augmentés en complexité et dans la diversité des sujets qu’il recouvrent.

 

La lisibilité est extrêmement importante pour lui. « La clarté est un élément indispensable » nous dit-il « rien ne doit se mettre en travers de ce que l’image veut faire. Dans mes travaux de jeunesse il y avait beaucoup de traces, délibérées, des mains de l’artiste, comme des gouttes et des frottis. Puis je me suis rendu compte que la peinture, en tant que force, à la responsabilité de faire fonctionner l’image. C’est ÇA qui produit ce sentiment d’émerveillement. »

Tag(s) :  Marshall

© Copyright 1996-2024
Votes : 4.8 / 5 basé sur 9383 commentaires.